Philippe Fretz, les pouvoirs de l'image

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Le Temps, mardi 13 août 2013
«In medias res», numéro un

Le Genevois lance un périodique sous forme d’édition d’artiste

Résident particulièrement actif des anciens locaux de l’Usine ­Kugler à Genève, et exposant de l’Espace Cheminée Nord qui s’y trouve logé, Philippe Fretz vient justement d’y présenter des fragments d’un projet au long cours. Il s’agit du «projet de classification d’images» auquel il consacre entièrement une publication quadrimestrielle, dont le premier numéro paraît aujourd’hui. Le résultat, tout en images ou presque, est à la fois intrigant et fascinant.

«Cartes postales personnelles»

Fascinant, parce que les images et surtout leurs détails, une fois isolés et mis en évidence, nous parlent intimement, réveillent en nous souvenirs et émotions. Intrigant, parce qu’en l’absence de commentaires ces images, justement, conservent leur mystère, et que leur choix, parmi l’infinité du registre à disposition, appartient à l’artiste et à lui seul. Le registre dans lequel il puise est composé de «cartes postales personnelles», qui résultent donc déjà d’un premier choix, ainsi que d’éditions et de catalogues, sans compter le moteur de recherche Google Images.

Quant aux critères de la sélection, outre les goûts et les affinités qui caractérisent et constituent Philippe Fretz, en tant que peintre et amateur d’art, ils tiennent dans une appartenance plus ou moins directe et évidente à quelques ­secteurs thématiques et icono­graphiques: le corps humain, d’abord, puis l’architecture, ou encore la végétation, et enfin la religion, tant il est vrai que l’histoire de la peinture occidentale, dans le passé tout au moins, se confond peu ou prou avec l’histoire biblique, plus précisément les étapes de la vie du Christ.

Dialogue

L’exposition, d’une durée très courte, s’intitulait In medias res , telle une trilogie qui voyait apparaître des objets, un chemin de croix, puis des personnages, idiots et moines. La spécificité de cette entreprise iconographique tient dans le dialogue établi entre les images retenues – le Gilles de Watteau côtoyant une image enfantine de Oui-Oui ou un portrait ­végétalisé d’Arcimboldo, une photographie montrant Alberto Giacometti peignant et une séquence révélant un moine, bras levé – et des détails imaginés par Philippe Fretz lui-même. Dont la peinture figurative, ou non figurative par moments, s’inscrit donc malicieusement au cœur même de l’histoire de l’art. Le pouvoir d’empathie manifesté, de même que les coloris doux et joyeux utilisés, compensent la fougue maladroite et une certaine naïveté, d’ailleurs revendiquée…

Laurence Chauvy